L’école autrichienne d’économie
La première école autrichienne
La première école autrichienne d’économie s’est constituée autour de la notion d’« individualisme méthodologique » associée en toute logique à un subjectivisme radical fondant sa théorie de la valeur sur l’appréciation subjective par le consommateur final des coûts de production. Nous sommes ici bien loin de la position d’un Alfred Marshall qui tentait de concilier les coûts, d’une part (l’offre), et l’utilité, d’autre part (la demande). Au sein de cette école, on retrouve K Menger, F von Wieser, E von Böhm-Bawerk, suivis d’une seconde génération autour de L von Mises (voir notre article), J Schumpeter (voir notre article) et F von Hayek. Une 3ème équipe a fini par se constituer autour d’O Morgenstern, F Machlup, P Rosenstein-Rodan ou encore G Haberler.

La seconde école autrichienne
La seconde génération s’est le plus souvent exilée au cours des années 30 : Mises quitte la Suisse en 1938, Schumpeter part aux USA en 1934, Hayek émigre à Londres en 1931, Morgenstern quitte l’Autriche en 1938, Machlup part aux USA en 1931, Haberler en 1932. Cette génération se distingue par une vision « chimiquement pure » de l’économie de marché, en droite ligne de la pensée libérale du XVIIIe s. Elle fait notamment de la rationalité des choix économiques un pilier de ses théories, prenant donc fait et cause contre les gouvernements qui paralysent les vrais prix de marché. Elle plaide systématiquement pour la concurrence et réfute toute 3ème voie entre le planisme et le marché, comme le proposera, d’une certaine manière, l’orthodoxie keynésienne dominante de 1945 à 1973, date à laquelle elle se fracassera sur le premier choc pétrolier…
Mais la seconde école de Vienne trouve aussi son carburant théorique dans la lutte contre les régimes autoritaires qui pullulent en Europe à l’époque : sa haine de l’Etat fort brimant l’individu nourrit son combat contre les idéologies totalitaires, nazie, fasciste, stalinienne. Leur rejet du socialisme est clair chez tous ces dissidents précoces d’une Europe qui bascule très vite dans l’arbitraire, l’extrémisme, l’anti-individualisme, ce qui débouchera sur une authentique phobie de l’Etat les conduisant à formuler des critiques vives y compris à l’encontre des « économies mixtes », sous la forme par exemple du travaillisme anglais, de la planification indicative française, de la social-démocratie allemande ou scandinave.
Ces situations intermédiaires leur apparaissent en effet comme des ersatz de politique économique keynésienne, articulés autour d’un Etat-providence généreux, d’une politique monétaire expansionniste et d’une relance budgétaire ; programmes auxquels la crise de mutation des années 70 mettra un grand coup d’arrêt, portant au pouvoir dans un grand nombre de pays des « libéraux » (Reagan, Giscard, Thatcher). C’est l’époque également où une autre école, monétariste, dite de Chicago, fait florès autour de la figure de M Friedman (auquel nous avons consacré cette rubrique en février 2021) et de son best seller : Les voies de la liberté (Free to choose). L’économie de l’offre (Laffer, Gilder) a désormais le vent en poupe, de même que l’école du Public choice (Tullock, Buchanan) qui se met à critiquer rationnellement l’intervention étatiste, donnant de nouvelles ambitions aux courants de pensée libéraux.
A la fin des années 80, l’école de Vienne et la nouvelle orthodoxie libérale qui s’est substituée au keynésianisme dominateur semblent cependant avoir échoué à fournir les recettes pour sortir de la stagflation. Mises et Hayek semblent toutefois avoir apporté un cadre de lecture d’une insondable fécondité, tant par sa cohérence d’ensemble que par la finesse du modèle d’économie de marché qu’il propose.

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