Krach 2023 : vers une désinflation en Europe ?

La semaine dernière, nous avons émis quelques hypothèses concernant le maintien de l’inflation à haut niveau en Europe et notamment en France. Que le lecteur averti ne voie pas dans l’article de cette semaine une contradiction : il apporte plutôt des précisions sur le chemin qui va nous conduire d’une inflation élevée (6-7% en glissement annuel, avec des pics à plus de 10% en zone euro) à l’inflation durable à un niveau soutenu (4-5% annuel) qui dépasse de très loin le mandat de la BCE (2%). Ce chemin porte un nom et tout porte à croire que l’Europe s’y engage peu à peu : c’est celui de la désinflation, c’est-à-dire du ralentissement de l’inflation, laquelle, conformément, donc, à ce que nous avons expliqué précédemment, ne devrait pas redescendre de sitôt sous la barre, qui reste élevée, des 4-5%.
Force est de constater, d’abord, que nous vivons depuis octobre 2022, n’en déplaise au Forum de Davos, un contrechoc énergétique, au moins aussi violent que le vrai choc énergétique d’octobre 2021, auquel, par la force des choses, l’opération russe en Ukraine, n’ayant pas commencé, n’avait pas contribué. Il s’en est suivi un quasi retour à la normale des prix de l’énergie, premier puissant facteur de désinflation en Europe.
Le tarissement du crédit, qui se fait sentir tant sur l’immobilier que sur l’investissement, depuis que le principal taux directeur de le BCE remonte (juillet 2022), pourrait aussi jouer un rôle désinflationniste, si ce n’étaient les carnets de commande industriels, pleins à craquer en post-pandémie, qui ont pris le relais.
Notamment tirés par le tourisme, les services ont aussi fait de la résistance, même si, fragiles, ils se retourneront à la première récession venue. Or, on l’a appris aujourd’hui, l’Europe vient d’entrer en récession, pour avoir dilapidé toute marge de manœuvre fiscale et budgétaire et faute de stimuli provenant de la demande externe (plombée par 6% de déficit public, la croissance US n’accélère pas malgré le plein emploi ; tirée par les seuls services cotés, la croissance chinoise reste limitée).
Ne reste que le choc de demande positif que constitue la perspective d’une désinflation sur le pouvoir d’achat des ménages européens, lequel reste tiré par une hausse annuelle moyenne des salaires de l’ordre de 5%. Cette désinflation pourrait alors être le fruit de trois facteurs :
- recul, nous venons de le dire, des prix de l’énergie ;
- assouplissement des chaînes d’approvisionnement ;
- perspective d’une accalmie sur l’inflation alimentaire sous le triple effet à nouveau de la baisse du prix de l’énergie, du léger raffermissement de l’euro (qui améliore notre capacité à importer moins cher) et de la fin, accélérée par Bercy, du rattrapage des marges par la grande distribution.
Si l’on peut toutefois encore s’attendre à deux hausses de taux de la part de la BCE, nous notons qu’il faut toujours privilégier dans vos portefeuilles les actions européennes, encore sous-cotées, par rapport à leurs homologues US et les titres à rendement fixe hors OCDE, soit des obligations souveraines émergentes dont je parle ici.
Florent Ly-Machabert
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